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Le bagne de Nepharia
France Logiciels - 1985
La laideur cache un cœur logique par EcstazY

Extras : Musique - Manuel TXT - Manuel PDF
Le Bagne de Nepharia. Un titre qui sonnait comme une promesse d'aventure spatiale, de prison galactique. Et en un sens, c'était exactement ça.



Soyons clairs : le jeu était immonde. Des couloirs gris. Des salles grises. Encore des couloirs gris. Toutes les salles se ressemblaient. Toutes. On se déplaçait dans ce labyrinthe monochrome en se demandant constamment si on était déjà passé par là. Pas de musique. Juste le silence oppressant d'une prison spatiale et le cliquetis du clavier.



Et pourtant, Le Bagne de Nepharia avait quelque chose. Un goût de bon RPG très old school des années 90. Cette sensation d'exploration méthodique, de cartographie patiente. Un couteau, une boussole, un laser, un sabre pulsar, une carte magnétique. Chaque objet avait son utilité.



La vraie révélation, c'était la logique. Après tous ces jeux absurdes – Kikekankoi et ses deltas mystérieux, Orphée et ses énigmes tirées par les cheveux – Le Bagne de Nepharia était logique. Pas d'instructions aléatoires du genre "Acheter des espadrilles puis mettre de la poudre dans un perroquet". Ici, quand on trouvait un laser, on pouvait tirer. Quand on avait une carte magnétique, elle ouvrait une porte magnétique. C'était reposant. On pouvait réfléchir.



Le jeu n'était pas punitif non plus. Pas de compteur qui filait. On pouvait prendre son temps, dessiner sa carte sur du papier millimétré, réfléchir calmement. C'était un soulagement après tant de jeux sadiques.



On dessinait des cartes. C'était indispensable. Le jeu se divisait en deux parties distinctes. Première partie : les cellules, les couloirs, les salles d'épreuves. Deuxième partie : d'autres couloirs, un générateur, un miroir, une trappe. On notait tout. "D = Départ", "S = Sortie", "L = Laser", "CM = Carte Magnétique". Nos feuilles à carreaux se couvraient de plans approximatifs.



Cette uniformité visuelle créait une ambiance. On était dans une prison. Froide, répétitive, déshumanisante. On se sentait enfermé, perdu, écrasé par ces murs identiques.



Le jeu n'était pas facile. Les énigmes demandaient de la réflexion, de l'observation. Mais c'était une difficulté juste. On bloquait parce qu'on n'avait pas encore compris comment utiliser le miroir avec le laser. Pas parce qu'il fallait deviner qu'on devait donner un poisson à un chat.



Et puis, après avoir résolu toutes les énigmes, après avoir activé le générateur et utilisé le sabre pulsar, on arrivait dans le désert. Un putain de désert. D'écran moche en écran moche, on errait dans ce désert de sable pixelisé qui ressemblait encore moins à quelque chose que les couloirs gris. On avançait au hasard. Nord. Est. Sud. Ouest. Encore. Encore. Où allait-on ? Aucune idée. On cherchait juste un point de sortie quelque part dans cette étendue monotone.



Et quand enfin – enfin – on trouvait ce point, deux possibilités. Soit un vaisseau nous attendait. Victoire. Liberté. Fin du jeu. Soit c'était un garde. Et là, mort. Game over. Recommencez. Parce que oui, c'était random. Complètement aléatoire. Après toute cette logique, toute cette réflexion, toute cette exploration méthodique, le jeu vous balançait une fin au hasard. Pile ou face. Vie ou mort.



C'était probablement le truc le plus frustrant du jeu. Tout ce travail, toutes ces heures passées à cartographier, à réfléchir, à résoudre des énigmes cohérentes, pour se faire tuer par un garde qui apparaissait au hasard. On recommençait alors cette errance dans le désert, en espérant avoir plus de chance la prochaine fois. Parce qu'il ne s'agissait plus de logique. Juste de chance.



À la récré, on comparait nos expériences. "T'as fini ?" "Ouais, au bout de quatre tentatives dans le désert." "Moi sept. Sept putains de fois j'ai trouvé le garde avant le vaisseau." On partageait notre frustration collective face à cette trahison finale.



Le Bagne de Nepharia n'était pas un chef-d'œuvre. Il était moche, répétitif, silencieux. Et sa fin aléatoire gâchait tout. Mais sous cette laideur se cachait un petit jeu solide, cohérent, respectueux de l'intelligence du joueur. Jusqu'à ce foutu désert, en tout cas.



Aujourd'hui, je repense au Bagne de Nepharia avec une tendresse particulière malgré tout. Pas pour sa beauté. Pas pour son désert stupide. Mais parce qu'il était honnête. Il ne cherchait pas à vous piéger avec des énigmes débiles. Il vous présentait un problème et vous laissait le résoudre. Avec votre cerveau. Votre papier. Votre crayon.



Jusqu'au désert. Là, il fallait juste de la chance. Et ça, ça reste impardonnable. C'était moche, c'était gris, c'était répétitif. Mais c'était logique. Enfin, presque. Si on oublie cette fin random qui nous fait encore grincer des dents trente ans plus tard.


Bonus : car on a tous le droit de se perdre, la soluce à l'ancienne

Le point de vue de César Ramos :
Introuvable neuf, toujours disponibles en copie.