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Power Piggs of the Dark Age
Titus - 1995
Le jeu de porc sain par Enker

Extras : Musique - Manuel TXT - Manuel PDF
« Hey kid ! Toi qui as connu la gloire des années 80 et ses tenues bariolées, toi qui grandis dans les 90’s, tu aimes lire les meilleurs comics US ? Tu ne manques pas un seul épisode du marvelous Spider-Man ou des uncanny X-Men ? Tu adores te régaler devant les plus beaux cartoons made in USA avec un bol de pop-corn avant d’aller faire un tour en Nike Air sur ton skate-board ? Alors pour toi kid, après les Tortues Ninja et les Tiny Toons, les Simpson et Batman, voici la nouvelle bombe venue tout droit des States : les puissants cochons du moyen-âge, Power Piggs of the Dark Age ! »



C’est plus ou moins le genre de discours que l’on aurait eu si une telle série avait vu le jour. Imaginez plutôt des cochons anthropomorphes tenanciers d’une boutique de donuts tout en faisant face à la tyrannie des affreux loups. Ca a un certain potentiel grotesque. Heureusement, on y a échappé.
Par contre, le jeu-vidéo existe bel et bien, lui.



Nous sommes en 1999 après JC. Toute la France est envahie par la troidé et la pleïstécheune. Toute ? Non, car certains rayons de magasins essaient de résister encore et toujours à l’envahisseur. Et la vie n’est pas facile pour ces cartouches face à l’insistance des Kévins qui veulent jouer au dernier Le Monde des Bleus.

C’est dans ce cadre alarmant que le Carrefour local décida un beau jour de céder à la pression et de dire adieu à tout un stock de jeux. « Vous avez perdu la bataille général, mais c’était pas ma guerre ! », sauf qu’au contraire je pouvais sabrer le champagne puisque tout un bac de jeux de Super Nintendo s’offrait à moi. A 50F pièce. Joie. Pour peu j’aurais levé les bras au ciel en exultant après avoir revêtu une chemise Bonne-maman. Mais voilà, je ne m’appelle pas Jean-Eudes.



Bref. Je rentrais chez moi en me délectant à l’idée de jouer à mes achats du jour. Pas forcément à celui-là, qui a une illustration toute pourrie sur sa boite. Des cochons en guise de super-héros, et puis quoi encore ? Pourquoi pas des tortues mutantes ou des crapauds de combat tant qu’on y est ? Allons bon, le verso de la boite en dit plus sur le contenu du jeu qui s’annonce mirifique ! Le royaume de Pigg a été assiégé par les troupes de l’infâme Wizzard of Wolff, et le rôle de sauveur est assigné aux tenanciers d’une boutique de beignets. Hum.
On dirige donc un cochon. Qui s’appelle Bruno. Voilà.



Je n’ai rien contre ce prénom hein. Mais déjà, voir un cochon proprio d’un magasin de donuts, ça sent l’arnaque quelque part. Et quand en plus il s’appelle Bruno, ça suinte l’échec critique. Je sais pas moi, il aurait pu s’appeler Homer par exemple (« je suis gros et je mange des beignets, youhouh ! »), ce serait mieux passé. Mais non, Radical Entertainment a décidé de frapper un grand coup sur la table : marre des personnages charismatiques aux noms évocateurs, on va créer un héros ridicule dans des vêtements trop petits pour lui, au job pourri et au prénom insignifiant.
Ayé, vous venez de créer le pire personnage de jeu-vidéo de l’histoire.



Mais il serait lâche de juger un jeu à sa forme externe, nous le savons tous. Si on s’arrêtait là, personne n’aurait jamais touché à Shaq-Fu, donc bon, stop aux préjugés (cela dit, je viens à l’instant de voir la pochette US de Phalanx et je ris tout seul comme un enfant)
C’est parti, j’insère la cartouche dans la fente de ma bonne Super. Les logos de l’éditeur (Titus) et du développeur (Radical Entertainment) se succèdent avant de laisser place à l’écran titre. Que dire à son sujet si ce n’est qu’il s’agit du plus bel écran du jeu ? Le trio des héros y est représenté : Bruno –que l’on ne présente plus–, Gilbert l’artisan ès-beignets, et Lotta la caissière. Bon goût ultime à la ricaine, la gonzesse a le meilleur boulot du groupe. Une cochonne entre deux saucisses, que demander de plus ? Rien du tout, elle n’apparaitra jamais plus dans le jeu une fois cet écran passé. Du travail d’orfèvre.

Survient alors l’écran de sélection. Et il est grand temps de parler de la plus grande arnaque du jeu, les mots de passe. Ah ça, pour y en avoir, il y en a. Un.



Un seul putain de mot de passe dans tout le jeu. Qui permet d’arriver directement au cinquième niveau du jeu sur huit, soit d’en passer 50% d’un seul coup. Puis après, plus rien, *pfiou*. Ce qui est magique là-dedans, c’est que ce mot de passe est une combinaison de quatre mots sur un ensemble de vingt possibles. Voilà, tout est dit : sur vingt, seuls quatre sont utilisés dans le jeu, c’est ce qui s’appelle une rentabilité ultime. Ah ça va falloir se lever tôt pour le trouver au pif ce mot de passe parmi les centaines de combinaisons possibles (lancez-vous dans le calcul si ça vous amuse, j’ai lâché l’affaire de mon côté)

‘fin bon, je dis ça mais je n’en sais rien, je ne les ai pas toutes testées et le net ne m’en donne qu’un seul. S’il le faut il y en a tout un paquet que personne ne trouvera jamais. Et vu l’intérêt porté au titre, tout le monde s’en fout. Je lance donc un appel officiel : si vous n’avez rien à foutre pendant vos prochains jours, testez toutes les combinaisons possibles pour voir s’il y a des mots de passe cachés ! Si vous y parvenez, vous deviendrez assurément une star du web et votre visage pourra figurer sur des images loufoques dans un anglais approximatif.



Allez, c’est parti pour le premier niveau. Y jouer quelques minutes, c’est au moins se faire une idée. Savourer les déplacements du personnage, apprendre à dompter son gameplay, apprécier son ambiance.
Mais…Mais…



Mais ce jeu est une merde !



Tout est dit. Ce jeu est un jeu de plate-formes tout ce qu’il y a de plus old-school, avec promenade dans un niveau plus ou moins vaste saupoudré d’ennemis jusqu’au point d’arrivée. Des bons jeux du genre on en connaît plein, notamment sur Super Nintendo. Mais là, ben c’est de la merde. Tout simplement. Rien que la maniabilité est calamiteuse, avec ce foutu cochon qui se déplace comme une pelle à tarte.

Et pourtant ce n’était pas forcément bien complexe à la base : un bouton pour sauter, un autre pour taper à l’épée, un troisième pour jeter un beignet (l’arme secondaire que l’on a jamais quand il le faut), plus une combinaison saut+bas pour écraser les caisses d’un coup de cul porcin. Se déplacer devient rapidement catastrophique, d’autant plus que les graphismes honteux n’aident pas, pas plus que les adversaires qui apparaissent sur l’écran tous les deux mètres.



Courage, j’ai déjà vu pire après tout, j’ai été témoin d’un débat « Autant ou au temps pour moi ? », ce n’est pas un pauvre jeu de Super Nintendo qui va m’abattre. Ce premier niveau est somme toute classique puisqu’il propose de traverser un village de bout en bout, aussi bien au sol que sur le toit des bâtiments, tout en trucidant tout un lot d’ennemis sur son chemin. Ceux-ci sont assez variés, même si l’on rencontre les mêmes dans quasiment tous les niveaux : loup sauteur, loup archer, loup cracheur de feu, etc… ce qui permet au moins d’essayer de trouver une stratégie pour se débarrasser de chacun d’entre eux. Mais même en s’y prenant avec précaution, la barre d’énergie diminue comme un bras de lépreux jouant de la guitare. La bonne idée est donc de récupérer de temps en temps des beignets qui redonneront un peu d’énergie, voire même ramasser des petites boules grises qui vous rapporteront une vie au bout de cent. Sans oublier non plus de bien s’armer avec des beignets à lancer dont il existe plusieurs types : ceux de base vont tout droit, les plus puissants sont à tête chercheuse et peuvent détruire plusieurs ennemis d’un coup.

Le défi est donc d’envergure : parvenir à la fin du niveau avant de se faire tuer, voire même y affronter un boss. Ce qui devient tout de suite plus compliqué puisque les niveaux sont longs. Très longs (oui, je sais.), et la mort revient à retourner au début du niveau. Heureusement il y a quelques stop points qui aideront à terminer un pauvre niveau. Sauf que s’ils sont mis en évidence dans les premiers niveaux, ils seront bien mieux camouflés par la suite (mention spéciale au dernier niveau). Je ne sais pas pour vous, mais quand je vois ça je reste rêveur.



En fait non, je trouve ça aberrant. Le jeu est compliqué, le level design est assez peu inspiré et rien n’est fait pour aider à progresser et à voir le niveau suivant. D’ailleurs c’est marrant ce que l’on peut faire quand l’inspiration vient à manquer, comme par exemple copier/coller les niveaux : deux de village, deux de forêt, deux de fabrique à beignets. Sans oublier les multiples passages sous-terrains, affolants de diversité ! C’est varié et imaginatif, la recette de l’ennui est là.
C’est donc moche malgré un graphisme qui fait très cartoon (putain, mais le cochon Bruno et son sourire ultra brite fait peur), difficile et peu maniable. Ah ça, faut voir le cochon se déplacer à la verticale dans les couloirs d’air pour s’en sortir avec une magnifique pirouette porcine. Complètement improbable, assez ingénieux…mais tellement mal fichu. Finalement, qu’est-ce qui va bien pouvoir redresser la barre ?



La musique bien entendu ! Uh uh, permettez que je me remette de ce trait d’humour. S’il y a bien un truc que je n’ai pas retenu dans ce jeu, c’est la musique. Il y en a pourtant, mais elles sont tellement insipides que l’on traverse les niveaux sans y prêter attention, si ce n’est celle du dernier niveau qui est assez sympathique. Cela laisse au moins le temps de profiter pleinement des sublimes bruitages pleins de qualité…oui bon ok, ils sont merdiques. Mais je suis honnête et je reconnais qu'il y a au moins un truc réussi dans ce jeu, à savoir l'animation des personnages. C'est assez fluide, les mimiques sont assez bien détaillées et l'aspect cartoon donne un ensemble assez comique.

Au passage, il y a un détail dont j’ai oublié de parler plus haut, c’est qu’il y a un mode deux joueurs. En coopération ç’aurait pu être intéressant, mais vu qu’il s’agit d’une stupide alternance à chaque vie perdue, mieux vaut l’oublier, tout simplement.



Si seulement la fin du jeu pouvait venir récompenser les efforts accomplis pour y parvenir, mais même pas. Une cinématique toute aussi cheap que le reste du jeu, un texte à la con disant que la guerre est finie et que les porcs sont des héros modestes, et puis voilà. On regarde ça d’un œil complètement désabusé, tout en se demandant comment de tels trucs ont pu traverser les filets de la validation de Nintendo, puis on éteint la console avant de retirer la cartouche et de la remettre à sa place, dans le tiroir. Pour ne plus la ressortir.



Les cochons, préférez-les dans votre barbecue.
Le point de vue de César Ramos :
Avantage : il ne vaut rien. On ne le voit pas souvent, heureusement.